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les histoires de géraldine
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29 mai 2005

NAD...suite

vous pourrez retrouver le début de ce long récit sur le message posté le 29/05/2005  : "écrire pour témoigner"

...

Elle noie son regard dans les braises , maintenant. Nad a l'impression que les lueurs rouges vascillent de plus en plus à mesure qu’elle les fixe. Par moment, une espèce de chaleur l’envahit ; ses joues sont plus que tièdes désormais, et elle fronce les sourcils ne voulant pas désarmer.

Elle désire être éveillée pour le retour de Pierre...

Le whisky n’est plus qu’un petit disque de couleur au fond du verre. Elle écrase son mégot dans le cendrier qu’elle a transporté de pièce en pièce, tout au long de la journée, et qui pour l’heure est posé là, à portée de main, sur une tablette toute proche. Elle renverse la tête et, pour un instant, se laisse aller. Elle ferme les yeux...

Ils sont un peu douloureux ces jours-ci, elle ne porte pas régulièrement les lunettes qui lui ont été conseillées pour la lecture et le travail écrit..., peut-elle dire qu’il s’agisse de coquetterie ? Non ! Sûrement pas ! C’est plutôt une sorte de négligence, ou un refus presque inconscient des faiblesses d’un corps humain auquel elle fait une confiance aveugle et qu’elle ne ménage pas, c’est incontestable !

Elle se laisse aller, paupières closes, vers ce qu’on appelle la décontraction. Heureux, sans doute, celui qui connaît et pourrait lui apprendre ce qu’est la totale décontraction !

Car il y a toujours un éveil pour Nad : son genou plié qui s’engourdit, sa nuque qui se ressent d’une position inhabituelle, ces petits bruits de la maison qu’elle perçoit malgré ce vent qui ne cesse de forcir...

Selon elle, être parfaitement sereine serait ne plus rien voir, ne plus rien entendre, ne plus sentir son corps ; ce serait entrer dans le fond d’elle-même, là où pas même un point ne brille, dans un noir total intérieur qu’elle se fabriquerait, un vide profond derrière ses yeux clos. Elle voudrait cela, même pour un court instant, mais cela sur commande, chaque fois qu'elle en a besoin.

Il est vrai aussi qu’elle ne dort pas très bien, même lorsque, très fatiguée, elle rejoint sa chambre le soir pour trouver un repos souhaité.

Fréquemment, en réalité, il lui arrive de remanier ses cours la nuit, ou d’inventer tous les malheurs possibles s’abattant sur elle ou sur des êtres qui lui sont chers; elle se relève, elle « vit encore » la nuit, comme elle l'explique souvent. C’est une anxieuse, elle ne peut le nier, et elle se sent désarmée devant cette impression que jamais son esprit ne la laissera en paix. Elle fait la liste pour le super-marché, organise le lendemain, prévoit les embûches dans son emploi du temps..., en dormant ou ce qui pour elle ressemble à dormir. La nuit, bien trop souvent, signifie pour Nad se coucher et se retrouver dans l’obscurité après s’être unie à Pierre, (mais cela de plus en plus rarement), et pour de brèves périodes seulement, perdre un peu conscience...mais le moindre bruit l’éveille, toujours. Elle voudrait que son cerveau tombe un peu en panne.

Ah, incontestablement, rien de plus facile que de dire : « Mais pourquoi te soucier tant ? à quoi ça te sert de te poser tant de questions ? détends-toi ! » à celui qui n’a jamais connu cet état d’éveil presque permanent. (On lui a conseillé le yoga, elle est un peu sceptique, mais elle essaiera, peut-être). Et puis on lui deamnde si elle réalise «  qu’elle est bien trop à l’écoute des autres aussi, qu’elle se crée des problèmes ainsi ? Il faudrait qu’elle apprenne l’égoïsme, sa générosité lui a pourtant joué bien des tours déjà ! Elle devrait avoir compris ! »

Mais l’égoïsme, on nait avec, sans doute, parce qu’elle, elle n’y arrive pas...Pierre, lui, ne la comprend pas, ne veut pas essayer, et ne s'en cache pas !…

Elle tend le bras lentement vers le paquet de cigarettes et, machinalement cette fois, en allume une autre. Nad sait qu’il arrive, ce moment où l’on ne peut plus parler de dégustation mais tout au plus d’occupation physique, aspirer, rejeter des volutes de fumée, crisper les lèvres à nouveau sur le filtre un instant, et remplir le cendrier...

Elle se sent épuisée désormais, et le calme intérieur de la maison l’emporte enfin sur tous les bruits venus de l’extérieur, sur les claquements des volets qu’elle commence à oublier...

C'est alors que la chaleur de l’âtre se fait plus lointaine... qu'elle entre dans un léger brouillard… qu'elle s’apaise un peu... que sa cigarette se consume sur le bord du cendrier...

Et… qu’elle a soudain l'impression d'entendre, venant de très loin, une sonnerie... puis plus nettement, une seconde... le téléphone !

Nad s'élance pour aller décrocher...

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