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les histoires de géraldine
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5 juillet 2005

Ar Bod ....pépère ...

vous pourrez retrouver le début de ce long récit sur le message posté le 29/05/2005  : "écrire pour témoigner"

PEPERE, LUI AUSSI, AVAIT AIME AR BOD..

Le père de Yann avait tout de suite adopté Nad et ses enfants. Il n’a jamais caché son bonheur à venir s’installer chez eux, pour quelques jours ou semaines,  chaque fois qu’il le pouvait. Yann vouait une sorte d’admiration à son père et, depuis qu’il s’était remarié, il avait eu à coeur d’offrir à Pépère les meilleures années de vieillesse possible, au milieu de sa petite famille.
Lorsque Nad avait épousé Yann, Pépère était à ses yeux un homme encore bien solide, alerte, qui aimait la bonne table. Sa santé l’autorisait à quelques écarts malgré le traitement qu’il suivait depuis de nombreuses années, à la suite d’une angine de poitrine. C'était un bon vivant...
Quand il venait passer quelques semaines en famille, Nad et lui s’installaient souvent pour bavarder. Pépère adorait se raconter. Il aimait beaucoup lire aussi.
« Ma petite fille » disait-il à Nad, « tu me trouveras bien quelque saine lecture dans ta bibliothèque ». Et Nad éprouvait un secret plaisir à lui proposer deux ou trois titres, sachant qu’ils auraient ensuite de bons et longs échanges sur les sujets choisis. Nad avait des raisons toutes personnelles de combler les attentes du vieil homme, elle comblait un vide en même temps, elle s’y essayait pour le moins. Personne ne peut remplacer un absent dont la disparition fut si cruelle. Jamais son père ne reviendrait.
Pépère a vieilli tranquillement, et petit à petit, il est venu de plus en plus souvent séjourner chez Nad.
Sa dernière année de vie a été très dure. Devenu presque impotant, il demandait une surveillance et des précautions, au fil des jours, de plus en plus exigeantes. Nad a eu parfois bien du mal à gérer la situation, et Yann l’avait comprise lorsque, submergée par l'ampleur de la
tâche, elle demanda que des soins infirmiers lui soient prodigués au domicile, par du personnel compétent.
Nad avait besoin d’être soulagée et surtout rassurée.

Pépère sentait ses forces s’amenuiser et son caractère changeait. De l’homme un peu grand seigneur, mais brave et peu compliqué, qu’il avait été, il devenait un malade exigeant, grincheux parfois, honteux de son état, sûrement. Nad le ressentait ainsi et comprenait son mal-être.
Pourtant il acceptait très bien son aide pour se déshabiller, le soir, avant de se coucher, et pour manger quand, par période, il ne pouvait le faire seul, mais il souffrait de cette déchéance, et ses propos étaient parfois amères, douloureux à entendre.
Pendant des mois, Nad a eu beaucoup de peine à sauvegarder l’ambiance joyeuse de la maison, ses deux plus jeunes enfants avaient aussi beaucoup besoin d’elle, et s’il n’y avait eu alors le soutien des deux grands fils et la contribution de Yann, elle aurait craqué, Nad, oui vraiment, elle aurait craqué malgré sa force de caractère et sa générosité.
De longs et difficiles mois se sont ainsi écoulés. Personne ne peut ni ne doit se donner au-delà de ses propres limites, et Nad fort heureusement connait ses limites. Au besoin, elle sait les rappeler, si parfois on cherche à abuser de sa bonté, pour se protéger, elle ne s’en cache pas,  tout simplement pour se protéger.

***

Lorsqu’en Décembre 1994, Pépère manifesta le désir de passer les fêtes de fin d’année auprès de ses filles, toutes les dispositions médicales furent prises. Il était de plus en plus faible .
Pépère alors quitta Ar Bod, pour ne plus jamais y revenir...

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